En camping avec des ados

Le camping « de l’extrême» (selon une pied tendre qui a animé les petits)

Une animatrice (qui ne l’est plus depuis) a laissé traîner son portefeuille par terre au milieu du camp des lascars. Ils sont des pros de la bidouille (achat vente dans tous les domaines). Évidemment le larfeuille disparaît. Les animateurs stagiaires, pas très formés veulent obtenir des résultats à la manière forte : Interrogatoire, lampe torche dans la gueule, -pire que des flics-. Les insultes et les menaces pleuvent. Un animateur perd patience et met un coup de poing à un des plus grands (de 19 ans). Ca part en baston. On sort remarquablement des objectifs pédagogiques du projet, pour rappel « sortir de son milieu et de ses lois urbaines ».

canyoning...

Tout le monde monte en pression, on évite la baston générale de peu. Une animatrice fait un numéro d’hystérique, une autre animatrice à deux sous, joue la scène de l’évanouissement…le cinéma « made in bled » prend de l’ampleur, personne ne contrôle plus rien… Avec deux animateurs, on largue toute l’équipe et on prend en charge les 18 ados à part, pour aller voir le foot ailleurs (c’est un soir de match important). Puis tout le monde se couche. Non sans le petit blabla pédagogique obligatoire auquel même nous, on ne croit plus avec les mots clé de l’animateur sérieux « accord respect règles échange valeurs… ». Le lendemain, le portefeuille est retrouvé sous une tente, intact. Août 2002.

On s’est fait lourder du camping des Sérigons de la Roche des Arnauds Hautes Alpes (que la planète entière le sache !). Exactement vingt-quatre heures après le début des installations : je venais de brancher le frigo. Alors après moultes recherches, on a atterri dans un camping de gitans un peu crado mais sympa, juste ce qu’il nous fallait, un peu paumé ; le personnel n’était pas farouche avec nos sauvages hurleurs. Juillet 2003.

Les grands se faisaient une beauté avec une tondeuse toute neuve : à un mètre de moi, Safo, rasé de près, et Guada avec une belle coupe toute fraîche…j’ai le trésorier de l’association en ligne « les flics vous cherchent pour une histoire de tondeuse »… Plainte du gérant de la supérette locale, une heure trente de commissariat. Juillet 2003

Un animateur stagiaire propose aux gosses d’aller voler pour lui : « ramène à tonton la paire de nike à 200 euros, en échange je te file un mars »…et les petits cons « ouais ok, tout de suite ».Mais les mômes sont venus le balancer au bout de 24h « eh Sido, ils nous achète là- uis ! »  Oui, mais sûrement pas assez cher pour qu’ils se taisent. Ils voulaient même lui faire la peau finalement. Il est reparti en train le lendemain,  sans son stage validé. Juillet 2003

La bande des petits shétans a sauté sur Mireille (13 ans). C’est une petite en manque d’affection, qui confond allumer et jouer. Ils l’ont pas ratée : arrachage de maillot dans la piscine en 25 secondes et coups et griffures sur tout le corps. C’est des animaux ces enfants ; Seydou (l’animateur référent préféré) les a sévèrement punis d’activité et de sucreries pendant les douze jours restants. Juillet 2003

A une soirée du camping, tous les grands dansaient comme des dieux, tout le monde n’avait d’yeux que pour eux :  ils sont beaux, souples, marrants, alors tout d’un coup c’est super d’être avec eux, j’oublie tous les plans pourris d’avant. Juillet 2003

Bilal fait des dérapages de fou furieux avec le cametard dans un champ. Il maîtrise c’est sûr, mais on fait pas mal de deux roues. Tout le monde se marre, mais c’est chaud, une vielle caution plane sur l’engin de location. Juillet 2003

Safo fait le con par la fenêtre du cametard : « Bac 20ème, mettez vous sur le bas côté, hep vous là bas papiers siouplaît ! quoi, t’as quelque chose à dire ? » Pendant tout le trajet de gap à embrun. (50 bornes, c’est long).  Juillet 20037

à la piscine

Mami (15 ans) est devenue super respectée parce qu’elle a mis une grande claque à Fio (18 ans). Après elle lui est tombée dessus comme une vraie tigresse. Pour s’occuper, il avait provoqué une baston entre sa sœur (13 ans) et le petit frère de Mami, Sakou (6 ans).Il devait sacrément s’emmerder pour ne trouver que cette occupation, mais il a du regretter, parce qu’elle a rien lâché. Mami c’est la plus belle des filles du quartier, mais c’est une bledarde, arrivée l’année dernière du Sénégal. Elle a un délicieux accent. Mais maintenant, même les grands filent doux avec elle.  Juillet 2003

Chris, c’est la tête en l’air du groupe, il est toujours en train de rêvasser, il capte rien. C’est celui qui sort en dernier du camion et qui a toujours oublié un truc. C’est aussi celui qui traîne avec les animateurs, et qui reste sans ses potes qui se sont déjà cassé y’a une heure. Juillet 2004

à la plage de Lisbonne -c'est froid-

Voyage voyage

Ce pauvre demeuré de Bachir (un animateur d’occasion) s’est paumé avec la bande des voleurs sur l’autoroute entre Porto et l’Espagne du nord. Au lieu d’attendre gentiment que l’équipe le retrouve, et d’écouter son téléphone rempli de messages, il a écouté les bons conseils des grands (ceux qui n’ont qu’un cerveau pour 5). Et ils ont, en 3 heures : volé de l’essence et se sont fait serrer au péage, cramé un péage, et se sont fait serrer au suivant, volé des tas de saloperies et une carte d’Espagne 300 km plus tard…Ils nous ont rejoint miraculeusement à l’auberge espagnole (grâce à Baba qui est intelligent). Après ça, ils viennent me voir et me disent « tu nous emmènes au Mac do, on est crevés et pis on a faim ». Donc, c’est NON, alors ils sont fâchés et pour se venger, ont foutus le souk dans l’auberge de jeunesse toute la nuit. Au point que les flics ont débarqué : ils ont 19 ans tous les cinq…C’est inquiétant hein ? A propos de flics, avec les voyages qu’on a faits, on pourrait faire un guide touristique des polices européennes. Bon, de toutes façons, y’en a pas une pour rattraper les autres. Juillet 2004

Soirée quartier libre

Encore de l’aventure en perspective…Dans un petit port au sud de Porto, les grands faisaient leurs trucs et je traînais avec les plus jeunes (les préados) en mangeant des glaces sur la «croisette » locale. Seydou arrive en courant avec une dizaine de jeunes hagards et essoufflés, la bande des grands cons suit en courant, poursuivie de 20 gars bien déterminés à se fritter et armés jusqu’aux dents : chaînes, cric, schlasses et bouteilles cassées au menu. C’est la bande à Kruel (il faut lire Kebra de Jano) façon Portugal. La plupart des gamins sont déjà dans le camion, les retardataires et nous (trois animateurs impuissants), nous sommes réfugiés sur la place du bled. Le gérant du bar local se dépêche de ranger la terrasse…tout le monde est pétrifié face aux hostiles portugais. Sauf Kassim, animateur stagiaire, et Lachmi (un adolescent qui se prend pour un caïd) qui font volte face : Kassim a chargé avec un parasol et ce con de Lachmi a sorti un couteau de légionnaire très impressionnant. Je ne sais pas comment, ça a mis en déroute les énervés et valait mieux, les tables et les poubelles volaient, et ça craignait sec ; une sorte de Madmax, made in Portugal, Madmakch quoi. J’ai que eu le temps de mettre une claque à un petit con de 15 ans, et de le renvoyer dans le camion : il voulait héroïquement participer au carnage…après ben, on a fait connaissance avec la police locale, (après la police Lisboëte)…Et donc, j’ai (encore) passé la nuit au commissariat à justifier et expliquer « ah euh oui oui, c’est des papiers du Sénégal mais ils sont français… » Ma jeunesse était entrée dans un de ces trucs à jeux vidéo. Ils ont essuyé des insultes genre « negrita, negro, filio (? hijo non?) de puta» et autres douceurs. Makéla avait mis un premier coup de tête… Juillet 2004

Un cerveau pour cinq

Les parents, qui croyaient leurs enfants partis un après midi au sport, ont commencé à m’appeler inquiets pour savoir si j’avais vu leur enfant vers 23h…. les grands du quartier m’ont dit qu’ils étaient partis à Troyes…effectivement, en appelant le commissariat de Troyes, j’ai appris que la bande des voleurs (toujours les mêmes, ceux qui partagent un seul cerveau difficilement) avait décidé de partir acheter (au départ) des habits en sortie d’usine. Ils étaient partis avec un niais sans permis au volant et le demeuré de la troupe était parti seul en train, faute de place. Une fois à Troyes, ils chourent les sapes et se font serrer sur la route 10 bornes plus loin. Ils avaient choisi un jour de match important (Troyes / Nancy) pour y aller, donc beaucoup plus de police surveillait les lieux. La police a gardé la voiture, faute de permis, et les parents sont allés les récupérer à la gare…certains ont encore mal aux cheveux. Mai 2004

Grande détresse

Une femme en grande détresse s’est bazardée du cinquième étage à 16h35 et s’est explosée devant tous les gosses qui sortaient de l’école.Ils ont fait des tas de commentaires comme si c’était rien pendant trois mois : « ah c’est dégueu tout le sang là…Ah ouais et t’as vu la jambe là toute tordue ? » mais les pompiers ont mis plus de temps à faire dégager les mômes que pour récupérer les bouts de corps. Ils en ont longtemps parlé avec de plus en plus de détails. Juin 2002

Bachir « les pauvres aussi sont cons »

La grande soeur de Bachir est revenue en cloque à 18 ans, elle a caché l’affaire à sa famille pendant des mois, en se saucissonnant le bide. Un jour elle s’est mise à pisser le sang et s’est retrouvé hospitalisée vite fait. Sa mère a fait le cinéma habituel des familles « déshonorées » et comme si la gamine en avait pas déjà assez bavé,  elle l’a obligé à envoyer le lardon, (pas bien fini au bled) dans un orphelinat. J’espère qu’entre temps il est mort, parce que sinon, il a une vie pleine d’avenir : un karlouch, prématuré, pauvre et orphelin à Alger (dans le meilleur des cas). La moyenne sœur de Bachir a fait la même, un peu plus jeune encore que sa sœur. Alors cette fois le père, on sait qui c’est : c’est le mec le plus barge et le plus violent du quartier. La légende dit qu’il s’est échappé de Saint Anne en sautant par la fenêtre du troisième…Alors la mère a refait le coup du « ya hbibi, ya hbibi quel malheur !!!  Regarde sale pute le déshonneur sur la famille »…et autres conneries du genre. Et on recommence avec le lardon, mais cette fois, en pouponnière française. (C’est l’évolution, on peut espérer que la 5ème sœur pourra le garder…). Le bébé –bien parti dans la vie- a passé deux ans à l’orphelinat et son père le dingo l’a récupéré, après avoir fait un mariage en règle avec une autre pauvre idiote qui se laisse tabasser.

Bachir s’est fait maltraiter pendant toute son adolescence par ses « potes » : prête moi ta sœur, je vais dans une fête…ta sœur la pute, t’es un pédé, tu vaux pas mieux que ta sœur…Et depuis il est devenu fourbe et pas très sympathique. Pourtant, on peut pas dire qu’ils ont pas eu d’éducation : leur père foutait une raclée par jour à un de ces enfants pour le faire progresser.

lascars à Venise

Phrases d’ados bonus

L’été 95 les ados  de Tremblay ont dit ça : -et Nko a noté-

« Bélaïd il a un frère alors il se la pète… ouais il se la pète parce qu’il a un frère» Sofiane

« ouais les affaires à Belaïd elle puent mais c’est pas grave, j’ai un jean pour dormir» Sofiane

« Vas y Béla, téléphone maison» fois quinze Bélaïd

« Wah y’a plus d’ pêches ! moi j’aime les pêches !» Bélaïd

« Les pamoi c’est des mecs qui courent et qui disent « pas moi !» Silence… « Voilà c’est fini !» Bélaïd

« Hé ! Marie jo Perec !» Bélaïd imitant MJ Perec

« Vas y tsé pas quoi ? dès que je passe devant sa tente, déjà ça pue, ouais ! vas y moi la prochaine fois je prends du dèrouik» Bélaïd

Concernant la douche : « C’est chiant y’a rien pour accrocher ses affaires dans la douche ! » « Ah oui ils devraient mettre des porte manteaux j’adore les porte manteaux j’en ai plein ma chambre et dès que je rentre de l’école, hop !» Samia

« Vas y Marc c’est deux de tension !» Cédric

« En Afrique y’a rien que des arabes» Sofiane

« Ouh là là !  T’as tout gâté ! …Arrête de gronder !»Yoan from africa

« Amirouche il est blanc comme Mickaël Jackson» Yoan

« Vas y passe moi un franchement !» Samir

« C’est les riches les bourgeois» Sofiane

« L’aut’ jour y’avait des flics, vas y y z’avaient même pas d’armes !» Sofiane

« Quand y s’agit de bouffer y veut pas bouffer, et quand y faut bouffer wah !» Hayet

« Si ma meuf elle est intelligente, elle sait qu’elle doit faire la vaisselle.» Cédric

« quand je fais la bouffe je suis Pierre Richard !» Ahmed.

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